Vie pimentée de militante (Bienvenue aux réfugié.e.s !)
Cultures : Le jeu de la madeleine avec la sauce à spaghetti aux côtelettes de porc de Michel Tremblay
Tarzile, une de mes culinoblogueuses préférées, nous fait découvrir un jeu lancé par une autre trippeuse de bouffe vivant en Martinique, Claudia de Cuisine Framboise.
Le défi : proposer une recette qu’on a découverte dans un roman afin de constituer une bibliothèque gourmande. Ça c’est cool ! J’embarque ! ! À mon avis, le livre qui atteint des sommets en la matière a inspiré le délirant film mexicain Como agua para chocolate (allez vous louer ça le plus vite possible !!! Le réalisme magique d’Amérique latine à son meilleur !) – non seulement chaque chapitre du livre commence par une recette, mais en plus il s’agit d’une fille qui transmet ses émotions à ses convives à travers les plats qu’elle cuisine. GÉNIAL !
Justement, saviez-vous que Michel Tremblay, mon auteur québécois fétiche, a déjà dit en entrevue que le réalisme magique avait joué un rôle important dans son œuvre ? Du personnage qui mange de la terre et finit par être emporté par le vent dans Cent ans de solitude de Garcia Marquez aux fantômes qui tricotent des vies dans Les Chroniques du Plateau Mont-Royal, il y a parenté en effet !
Une des milliers choses que j’aime dans l’oeuvre de Tremblay, c’est l’intertextualité. D’une œuvre à l’autre, on retrouve un personnage, un coin de rue, une anecdote, et si on prend le temps de tout lier, on arrive à la création d’un monde cohérent et délirant à la fois ! Une recette peuple d’ailleurs ses livres, celle de la sauce à spaghetti aux côtelettes de porc. Je n’ai pas pris le temps de chercher toutes les occurrences, mais j’ai au moins retrouvé LA description du plat aux pages 239-240 des Douze coups de théâtre (Babel, Leméac/Actes Sud, 1992) tel que mitonné par les femmes de sa famille.
En voici des extraits : « ... pendant que frémit la base de tomates, d’ail et d’herbes, elles font revenir les côtelettes de porc dans une poêle à part. Quand les côtelettes commencent à dorer, elles les jettent tout simplement dans la sauce et laissent mijoter pendant des heures et des heures. (...) Pour manger tout ça, il suffit de verser sur une assiettée de « spaghetti plat » - c’est ainsi qu’on appelle les linguine dans ma famille – de retirer les os dont la chair s’est complètement détachée, de les poser dans une assiette au milieu de la table. (...) Ça goûte fort l’ail, le fromage romano (...) et même un peu d’huile d’olive... »
J’étais excitée comme une puce le jour où Michel Tremblay a été invité à l’émission À la di Stasio car je me doutais bien qu’il y ferait la recette – ce qu’il n’a pas manqué de faire, hourrah ! Nous l’avons ensuite essayée à la maison et c’était délicieux, quoique, lorsque je la referai, je prendrai soin d’enlever le plus de gras possible des côtelettes avant la cuisson et même d’enlever le gras figé sur le dessus du plat le lendemain (c’est connu, les plats mijotés sont meilleurs réchauffés).
Voilà, tout ceci pour participer au jeu de la madeleine (vous aurez tous deviné l’allusion à la madeleine de Proust... Ces réminiscences que les gens confondent parfois avec la synesthésie ! Sauf que tout le monde peut évoquer des souvenirs en goûtant ou humant alors que la synesthésie, c’est une tout autre histoire !).
Merci Tarzile et Claudia pour m’avoir donné l'envie de participer !