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  • Parentitude : Transgresser les règles pour mieux allaiter

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    31 juillet 2007 - mon allaitement, avec recul...

    J’ai allaité pendant 13 mois, par choix.  Avec conviction et, petit à petit, avec plaisir (à la fin, c’était très certainement par pur plaisir !  J’ai arrêté parce que fiston a cessé de vouloir téter !)  Maintenant que Léonard a plus de 2 ans, je repense à ces doux moments avec une quasi nostalgie.  Et j’ai hâte d’allaiter, un jour, un deuxième bébé !

    Pourtant...  Les premières semaines d’allaitement furent très difficiles.  Non seulement j’ai collectionné les problèmes – gerçures, crevasses, muguet et mastite en même temps, lorsque le petit a eu une semaine – mais en plus, j’ai d’abord reçu une « aide » que je qualifierais d’inappropriée.  En fait, j’ai été à un cheveu d’arrêter complètement de donner le sein, d’un seul coup; ce qui a sauvé mon allaitement, c’est tout d’abord l’empathie d’une infirmière dans un autre CLSC que le mien – empathie : donc reconnaissance de ma douleur, de ma peine, et refus de perpétuer la souffrance – et l’aide d’une excellente conseillère en allaitement.  Si je n’avais reçu que les conseils des infirmières de l’hôpital, de mon CLSC, du Mieux vivre avec son enfant 2005 et du Guide Nourri-source... mon expérience d’allaitement aurait duré une semaine et me laisserait que de mauvais souvenirs !  Et cela aurait été tellement dommage.

    C’est pour cette raison que, lorsque mon petit a eu 4 mois, j’ai écrit un texte sur mon histoire (voir ci-dessous).  Tout simplement parce que je crois que le purisme en matière d’allaitement peut nuire plus qu’aider. Parce que la souffrance n’a pas sa place dans le magnifique geste d’allaiter. Parce que je crois qu’une approche plus souple peut faire la différence.  Enfin, parce qu’une femme qui vient de vivre une grossesse de 9 mois, qui vient d’accoucher, qui a peut-être le périnée déchiré, qui a les hormones qui jouent au yo-yo, qui ne dort presque pas et qui est en plein baby blues mérite de recevoir autre chose qu’une liste de contre indications sans fin et, dans certains cas, culpabilisantes. Si elle souffre, elle mérite qu’on reconnaisse cette souffrance et qu’on lui propose des accommodements et des solutions afin que cette souffrance cesse.  Pour elle, et pour son bébé – une maman détendue, reposée, confiante, n’est-ce pas ce dont un bébé a le plus besoin ?!

    J’ai un rêve : qu’il y ait un jour non seulement des hôpitaux certifiés « amis des bébés », mais aussi « amis des mamans ».  Cela paraît évident, et pourtant !!!

    13 septembre 2005

    Comment c’est en transgressant toutes les règles de l’allaitement que j’en arrive aujourd’hui à allaiter mon bébé avec bonheur !

    En effet, j’allaite avec bonheur mon bébé de plus de 4 mois, un bébé resplendissant de santé, épanoui, qui dort bien, tête bien, rit aux éclats et nous fait les plus beaux sourires du monde.  Pourtant, dès ses premiers jours de vie, j’ai collectionné simultanément de nombreux problèmes (gerçures, crevasses, mastite, muguet, le tout combiné à un baby blues très sévère) et j’aurais arrêté l’allaitement si je ne m’étais pas donné le droit de transgresser toutes les lois des puristes en la matière !  Alors aujourd’hui j’ai pensé témoigner de mon expérience... Pas pour dire aux femmes « vous devez faire ci ou ça » mais bien plutôt pour illustrer que l’important est de se respecter et de s’écouter plutôt que de culpabiliser en s’en tenant à des règles strictes même lorsque nos besoins diffèrent !

    Mon choix : allaiter  

    Depuis toujours, bien avant de tomber enceinte, mon choix est fait : je veux allaiter.  Pour toutes sortes de raison : c’est naturel; pratique (toujours stérile, à la bonne température); ça favorise les liens maman-bébé, peau à peau; ça prévient toutes sortes de problèmes de santé chez le bébé et chez la maman; et ça évite d’encourager ces satanées multinationales, comme Nestlé !  D’ailleurs, avant même d’accoucher, mon objectif est d’allaiter au moins jusqu’à ce qu’il soit possible de donner du lait de vache (9 mois) pour éviter les préparations lactées qui, toutes, contiennent des OGM et sont manufacturées par des multinationales aux gestes à la moralité douteuse. Bref, à la naissance de mon bébé, je commence à allaiter avec enthousiasme et aucun préjugé.

    Comme c’est étrange, pourtant...  Dans les livres, on insiste beaucoup sur les nombreux  avantages de l’allaitement, mais très peu soulignent certains éléments de l’allaitement qui font aujourd’hui de moi une femme qui est, oui, heureuse d’allaiter, mais pas à n’importe quel prix !   En voilà deux :

    - La fatigue.  Je n’avais pas conscientisé le problème du sommeil en lien direct avec l’allaitement.  En effet, quand on allaite à 100% et que le petit boit systématiquement aux 2-3 heures, on ne dort jamais plus de 2h d’affilée.  Bonjour la fatigue ! Certaines personnes ont besoin de beaucoup de sommeil pour fonctionner ou à tout le moins pour avoir le moral.  C’est mon cas.  Dans les pires moments, je me suis mis à envier follement celles qui ont choisi le biberon et dont le conjoint peut donner un boire de temps en temps, permettant à la maman de dormir un petit 5 heures ! Dire que j’ai lu le conseil suivant dans le cas où le bébé a une poussée de croissance ou qu’on a une mastite ou autre problème douloureux : « allaitez plus souvent ET reposez-vous ».  Ha ha ha !  Quel sens de l’humour !

    - Déshydratation/constipation.  On nous dit de boire beaucoup lorsqu’on allaite car la production de lait demande beaucoup de liquide. J’ai bu beaucoup, beaucoup et je bois toujours beaucoup, beaucoup.  Sauf que la constipation est devenue tellement grave un mois après l’accouchement que je me suis retrouvée avec des fissures anales – et j’ai dû subir, après trois mois de douleurs insoutenables, une chirurgie !  (Oui, je sais, je ne suis pas chanceuse !) Avoir su que la déshydratation pouvait aller si loin, j’aurais pris le problème plus au sérieux (qu’est-ce que la constipation lorsqu’on a déjà tous les problèmes cités ci haut ?  C’était le moindre de mes soucis !) en prenant un supplément de fibres, par exemple.

    Première loi transgressée : la suce (ou « sucette d’amusement »)

    Dès le 2e jour de vie de mon bébé, juste avant que nous quittions l’hôpital, une infirmière nous recommande de donner la suce à notre bébé car il pleure même après un boire de 40 minutes (20 minutes par sein) de colostrum.  Elle nous dit que les bébés ont parfois envie de téter pour téter.  (Et compte tenu de l’état de mes mamelons dans les premiers jours, une chance que je ne le laisse pas téter pour téter !!!)

    Eh bien, depuis ce jour, nous lui offrons parfois la suce... mais ça ne l’intéresse pas trop !  À part lorsqu’il a soudain très faim et que nous sommes sur l’autoroute, par exemple, et que nous devons attendre quelques minutes avant de pouvoir lui donner le sein.  Dans ce cas, c’est bien pratique, ça le fait patienter (bien que mon petit doigt fasse aussi l’affaire).  Sinon, ça ne l’a jamais empêché de téter le sein.

    Deuxième loi transgressée : le biberon  

    Au 7e jour de vie de mon bébé, il a une soudaine poussée de croissance et veut boire aux heures.  Or, mes mamelons sont en sang; j’ai des crevasses, des gerçures, du muguet, une mastite (et pourtant j’ai fait tout ce qu’on m’avait dit de faire pour éviter cela... mais je suis épuisée.)  J’ai si mal, je suis si fatiguée et je suis si triste (je vis un baby blues sévère et les infirmières et les médecins du CLSC vont envisager de me médicamenter) que je n’arrive plus à nourrir mon bébé.  Je tressaille de douleur dès que mon amoureux approche le bébé vers moi.  J’appelle en larmes toutes sortes de services.  À Info-Santé, on me relit tout le baratin que j’ai déjà lu dans le Mieux vivre et dans le Nourri-source; mais je n’en suis plus aux douches chaudes ni à la lanoline, et autres trucs préventifs, tout ce que je souhaite c’est que mon petit bébé boive à sa faim sans toucher à mes seins !!!  Une parente qui a elle-même une marraine d’allaitement et possède une expérience d’allaitement super positive me conseille de changer de position (j’alterne déjà entre madone inversée et football).  Mais je n’en suis plus là non plus, je souffre trop.  Je me précipite à l’hôpital où une infirmière offre une préparation lactée à mon bébé, qui l’engloutit.  Je suis si émue de le voir ainsi, de profil, les yeux grand ouverts, téter goulûment son biberon !  Enfin il boit et n’aura plus soif.  

    Troisième loi transgressée : le tire-lait

    Ce soir-là, nous louons un tire-lait. C’est une véritable course contre la montre car les pharmacies vont bientôt fermer et je passe des heures au téléphone avant qu’une d’entre elle me confirme qu’il reste un tire-lait de disponible.  Ouf, je pourrai continuer à stimuler ma production de lait... en attendant.  Et heureusement, ça ne fait pas mal.  Je suis si fatiguée, stressé, et triste que ma nouvelle panique concerne la stérilisation des biberons.  Je passe mon temps à les faire bouillir alors que j’apprends ensuite qu’il est nécessaire de les stériliser à l’achat et qu’ensuite l’eau chaude et le savon suffisent.

    Dans les jours qui vont suivre, nous donnons plusieurs biberons au bébé, soit de lait maternel, soit de préparation lactée.  Je donne le sein de temps en temps mais le saignement revient et la mastite rend la moitié de mes seins rouge tomate. 

    Durant ces quelques jours, je pense passer aux biberons à temps plein un nombre incalculable de fois.  C’est grâce aux gentilles personnes qui m’ont aidée par la suite qu’il n’en sera rien.

    Dire que la marraine d’allaitement de ma parente, lorsqu’elle a appris que j’avais utilisé un tire-lait, a réagi en s’exclamant : « Oh non, elle n’a pas commencé ça ! »... Non mais ?!

    Oh surprise, mes copines se mettent à me raconter leurs difficultés du début de l’allaitement  !!!

    Tout à coup, j’en entends de toutes les couleurs. « Je mordais dans une débarbouillette mouillée quand le bébé prenait le sein », « je mordais dans de la glace », « ma petite régurgitait sang et gales ».  Comme quoi ce n’est pas toujours aussi merveilleux que ça en a l’air, hein ?  Même chose pour le baby blues.  Les discours changent depuis que j’en parle ouvertement.  Certaines ont consulté, disent que ce fut bien loin d’une lune de miel le ou les premier(s) mois... Ce qu’on se sent moins seule quand de vrais témoignages nuancés percent le discours unique du bonheur total !

    Vive la conseillère en allaitement !

    Plus de douleur.  Une méthode qui fonctionne vraiment.  Ça y est ! On ne fait pas « le sandwich » avec le sein au complet mais avec l’auréole seulement; on peut même entrer ses deux doigts dans la bouche pour être sûre que le bébé prenne assez grand.  Pour mieux diriger le bébé vers le sein, y’a rien comme de lui tenir les deux oreilles depuis l’arrière de sa tête.

    Mais pourquoi n’y a-t-il pas de conseillère en allaitement à l’hôpital ?  Pas que les infirmières ne soient pas bien intentionnées, seulement ce n’est pas leur spécialité... Merci à Chantal, grâce à qui j’ai retrouvé toute ma motivation à allaiter.  Sans douleur. Avec bonheur.  Mais après un temps d’arrêt pour laisser reposer mes seins, grâce au tire-lait et au biberon, hein !

    Quatrième loi transgressée : l’eau !  

    C’est la canicule et bébé boit presque sans arrêt. Bien sûr, dans les documents sur l’allaitement, pas question de donner de l’eau au bébé (le début du boire est plus aqueux et désaltère le petit...) Je n’ose donc pas en donner.  Une jeune maman qui parle de ses soirées où elle allaite presque sans arrêt, dans une rencontre « parlons bébé » du CLSC, se fait répondre du tac au tac : « pas d’eau » !  Et pourtant, mon médecin qui m’a suivie pour ma grossesse me le recommande dans ces situations extrêmes où bébé boit sans arrêt, en pleine chaleur.  Même la diététiste du CLSC le recommande – une toute petite quantité d’eau chaque jour, dit-elle !  Alors quoi ?...

    ... Je n’ai donné d’eau qu’une seule fois à mon bébé.  Mais j’aurais pu en donner une petite once de temps en temps les soirs de canicule. Comme si les femmes ne pouvaient pas faire la différence entre le fait de donner de l’eau au lieu du lait plusieurs fois par jour et des situations exceptionnelles ?! 

    Vive l’allaitement mixte ! (et donc le biberon...)  

    Peu à peu, donc, l’allaitement se vit sans douleur, et je redécouvre que ce peut être, en effet, une méthode pratique, simple, agréable.  Mais le problème de la fatigue n’est pas résolu pour autant.  Je suis épuisée (entre autres, le petit boit parfois de 17h à 1h presque sans arrêt !  Ouf !)  Et comme mon copain a expérimenté le biberon auprès de notre petit pou pendant la période de douleurs intenses, il m’offre de donner le boire de l’aube.  Ainsi, si le petit demande à boire entre 5h et 8h du matin, il lui donnera le biberon.  Et comme je suis épuisée, pas question de prendre une heure par jour pour tirer mon lait pour ce biberon, puisque l’objectif est que je DORME un peu !  Alors il s’agira de préparation lactée. Je me dis que, un boire sur huit, c’est loin d’être considérable !  Eh bien, je peux dire aujourd’hui que ce fut rien de moins qu’une thérapie.  Lorsque je donnais un boire à 2h, 3h ou 4h du matin, je savais qu’au prochain je resterais au lit pour dormir un bon 4 heures en ligne.  Ma santé (physique et mentale) s’est considérablement améliorée dans les jours qui ont suivi cette décision...  Sans compter que le papa a apprécié ces moments d’intimité en tête à tête avec son petit (bien qu’il y en avait d’autres, bien sûr !)  Nous avons procédé ainsi jusqu’à ce que le petit dorme 6, 7 heures en ligne, et ce de plus en plus souvent, à partir de l’âge de trois mois.  Maintenant, nous n’avons plus à lui donner de biberons (sauf le jour de ma chirurgie où il l’a repris comme si de rien était pour ensuite reprendre mon sein sans problème).

    Quand je raconte ce que j’ai vécu, on me fait souvent la remarque suivante (c’est le cas d’une infirmière, entre autres) : « Et vous avez quand même continué ?  La plupart des femmes auraient jeté l’éponge depuis longtemps.  Bravo ! »

    ***

    En serions-nous déjà à l’étape de l’introduction des aliments solides ???

    Mon petit aura cinq mois dans deux semaines.  Il boit beaucoup, beaucoup le soir avant de dormir.  On se dit qu’il sera sans doute bientôt prêt pour les céréales.  J’ai commencé à préparer et à congeler de bonnes purées avec les légumes bios que je reçois comme participante au projet d’Agriculture soutenue par la Communauté d’Équiterre.  Alors... qu’attendons-nous pour commencer à introduire les aliments solides ?  D’abord, j’attends que ma convalescence soit finie (quand on se fait opérer au derrière, y’a rien comme d’allaiter couchée !!!). Ensuite, je conscientise peu à peu ce que signifie ce changement puisque l’allaitement est devenu quelque chose de très doux dans ma vie, et que mon petit en profite délicieusement bien !

    En un mot : autant les débuts de l’allaitement furent difficiles, aujourd’hui, je n’ai plus envie d’arrêter !  Mais pour en arriver là, on m’a écoutée, comprise, sans essayer de me culpabiliser; et on a cessé de me rebattre les oreilles avec des « il ne faut pas que ».  Sans quoi j’en serais aux biberons à temps plein depuis belle lurette !