Vie pimentée de militante (Bienvenue aux réfugié.e.s !)
Causes : Une minute de silence, 15 000 jeunes, rue Sainte-Catherine
La Marche 2/3 2007. Le 11 mai. Point d’orgue à une année de mobilisation auprès de jeunes et d’intervenants scolaires, nous marchons dans les rues de Montréal. Nous escortons 15 000 jeunes venus des 4 coins du Québec pour célébrer leur solidarité envers les 2/3 – que dis-je, les 2/3, les 4/5 ! – de l’humanité qui vivent dans des conditions de pauvreté intolérables. Venus clamer haut et fort qu’ils ne restent pas passifs à regarder le monde aller, que leur engagement ne fait que commencer. La musique et les percussions les font danser, ils sont déguisés, brandissent des mini chars allégoriques fabriqués à partir de matériaux récupérés... Bref, c’est la fête !
Rue Sainte-Catherine, coin St-Urbain, la foule s’immobilise. De la tête à la queue du cortège, nous communiquons la consigne par walkie-talkie: quand les 15 000 marcheurs seront arrêtés, nous « lancerons » la minute de silence !
Les systèmes de son se taisent. Nous sommes plusieurs, spontanément, à lever la main en signe de peace. De l’autre main, un index sur la bouche, les regards se croisent et remontent le cortège comme une vague. Wououououfffffff.... Le silence déferle, déboule, s’engouffre dans les rues du Centre-Ville. Bientôt, même les badauds, fumeurs en pause, commerçants « alertés » par cette soudaine éclaircie de sérénité, se taisent. Le temps reste suspendu.
Dans mes écouteurs, j’entends en direct les réactions de mes collègues. Une bénévole, postée à des kilomètres de là, dans le vieux Port, lance : « la minute de silence, elle m’émeut, pis chu même pas là avec vous !!! » Et moi qui communique avec tellement de spontanéité, je ne pense même pas à parler. Mes larmes coulent tout comme celles d’un bénévole à mes côtés. Je pense au monde dans lequel mon fils va grandir, je pense à ce monde que les jeunes sont en train de construire pour demain, je pense à mon père qui déjà construisait ce monde de solidarité avec ses étudiants, je pense à ma mère et « notre » belle-famille sri lankaise, si loin et si proche en même temps. Bref, je pense aux 7 milliards de frères et sœurs de mon fils.
10, 9, 8... PADABOUM ! Un cri de 15 000 jeunes vient nous rappeler que le carnaval est loin d’être terminé !
Quant à mon collègue Jean-Pierre, il vient de gagner tout un pari ! Un animateur dont c’est la 28e Marche venait de lui glisser à l’oreille : « si tu réussis à faire taire toute cette gang de jeunes-là, je te paie une bière ! » Il a depuis rectifié son offre : ce sera une caisse pleine, minimum !
Je n’ai qu’un objectif supplémentaire pour l’année prochaine : non seulement on fera encore la bonne nouvelle TVA, non seulement on passera à RDI et d’autres postes, non seulement le journaliste de la Gazette va encore tripper comme un fou, mais le Téléjournal AUSSI va prendre la peine de souligner l’engagement festif, positif, pacifique de tous ces jeunes !!! Bon !
Crédits photo : Émilie Couture/CLUB 2/3